Pablo Picasso a peint ce tableau un peu plus d’un an après ses célèbres *Demoiselles d’Avignon*, grande toile conservée aujourd’hui au MoMA de New York. On parle souvent des *Demoiselles* comme de sa première œuvre cubiste car les corps y sont représentés de manière très simplifiée et anguleuse. L’*Homme nu assis* pousse encore plus loin la géométrisation des volumes : la plupart des contours du corps sont des lignes droites, le cou et les cuisses sont des cylindres, les épaules ressemblent à des demi-sphères posées sur les bras massifs du personnage, sans oublier le sexe oblong. Le visage aussi est réduit à quelques traits caractéristiques : l’ovale parfait de l’oreille et la forme triangulaire du nez, qu’on dit « en quart de brie » parce qu’il ressemble à une portion de fromage. L’art africain a sans doute joué un rôle dans cette nouvelle manière de représenter la figure humaine. Pablo Picasso était fasciné par les masques et les statuettes de Côte d’Ivoire qu’il pouvait voir au Musée d’Ethnographie du Trocadéro et dans des galeries d’art. Il n’est donc pas surprenant que les visages de ses personnages ressemblent à des masques rituels.

Paul Cézanne est une autre source d’inspiration majeure pour ce tableau. Le modèle assis est coupé au niveau des cuisses et se détache sur fond sombre comme dans ses portraits. La peau n’est pas rendue par des nuances de rose comme dans les *Demoiselles d’Avignon* mais par des teintes ocre et orangées et on aperçoit une touche de vert dans la partie inférieure de la toile. Ces couleurs rappellent celles des paysages de Cézanne.

Roger Dutilleul a été l’un des premiers collectionneurs français à acheter des tableaux cubistes. Il a transmis sa passion à son neveu Jean Masurel, qui a acheté *Homme nu assis* et l’a inclus dans la donation faite à la communauté urbaine de Lille en 1979.